“...Derrida réfléchit sur le témoignage à partir du récit de Blanchot et le présente comme cette demeure de la mort, du sujet, comme ce lieu où il de-meurt. Car qui survit à l’éxécution avortée? Qui en raconte le récit? Le témoin qu’est Blanchot est double, paradoxal. L’homme qui raconte est et n’est pas le jeune homme qu’il était, celui dont il raconte l’histoire et qui survit en celui qui a survécu à une mort qui n’a pas eu lieu. Derrida trouve dans ce texte de Blanchot l’exemplarité du témoignage, et dans la figure du narrateur la qualité propre à tout témoin dont la parole se trouve désormais en instance, dont le récit n’arrive jamais. A terme. A demeure. Si le témoignage se veut un discours de vérité par le biais duquel justice peut être rendue, il demeure que ce mode de discours est aussi peu fiable qu’un œuvre de fiction. Derrida indique la nécessaire impossibilité testimoniale: le secret gardé malgré le témoignage qui est donné, la singularité d’une énonciation qui se veut en même temps exemplaire, l’incertitude du témoin qui à la fois se reconnait et ne se reconnait pas dans celui qu’il était, qui traduit une expérience en partie “inéprouvée”...
Martine Delvaux, Histoires de fantômes - Spectralité et témoignage dans les récits de femmes contemporaines, p.23, Les Presses de l’Université de Montréal, coll. Espace littéraire, 2006
voir / see:
Maurice Blanchot, L’instant de ma mort, Fata Morgana, Paris, 1994
Jacques Derrida, Demeure - Maurice Blanchot, Galilée, coll. Incises, Paris, 1998
& Franz Kafka, Orson Welles - Le procès / The trial
livre: de préférence la traduction de Georges-Arthur Goldschmidt
in French we will recommend the above translation
film: voir / see: http://www.imdb.com/title/tt0057427/