generic associés / generic associates, Paris
Collectif de Réflexion & de Création
(son/image/texte)
Thought & Creation Collective
(sound/image/text)
& generic - autoportrait, "camera obscura"
/ generic - self-portrait, 'camera obscura'
création / unveiling
09.09.09 @ e.space generic
extrait:
fini sans bords, un e.space le 09.09.09
Un saint de Sienne parlait de l'Annonciation au Quattrocento pour dire la venue de l'invisible dans la vision, de l'infigurable dans la figure, "l'invisible devient socle, vérité et destin du visible. De là l'idée d'un, visible habité, animé par l'Esprit, que tout le visible a un sens, et que tout ce qui se voit peut se dire. Il y a un fin mot du visible." (1)
Jusqu’à l'eternité elle-même dans le temps, l’infini dans le fini.
Nous n’en sommes pas restés là (malgré les apparences). D’incrémentations en rupture un basculement a eu lieu, à l’âge de l’atome et du soleil sur terre, le doute, l'absence, le manque, la dé-coïncidence du mot et de la chose se sédimentent durablement.
Pour les modernistes une nouvelle “weltaunshung”, philosophie de la vie - vision du monde se déploie, déterritorialisée: "Nous ne voyons pas les choses elles-mêmes: nous nous bornons, le plus souvent, à lire des étiquettes collées sur elles. Cette tendance, issue du besoin, s'est encore accentuée sous l'influence du langage. Car les mots (à l'exception des noms propres) désignent des genres...
Et ce ne sont pas seulement les objets extérieurs, ce sont aussi nos propres états d'âme qui se dérobent à nous dans ce qu'ils ont d'intime, de personnel, d'originalement vécu.
.../... Ainsi, jusque dans notre propre individu, l'individualité nous échappe. Nous nous mouvons parmi des généralités et des symboles". (2)
L’image devint sa propre trace, mémoire opposée à perception, la représentation devint un enjeu dont les termes ne cessent de nous déborder.
Celle de l'humain surtout, dans la deuxième partie du XXème siècle, Rothko parlait de mutilation, ailleurs Adorno, Celan et d’autres montrent le siècle sur son gouffre irreprésentable, si aigu et si lent est l’héritage.
Plus près de nous, le fini dans l’infini sans bord de l’univers, son expansion à des vitesses affolantes, son bruit de fond assourdissant, et pourtant nous parlons encore de la “musique des sphères”, là où même le silence est représentation (l'absence de quelque chose, plutôt que la présence de...)
De la lumière et l'image nous croyons encore connaître “l'étroite chaîne”
De l'autoportait on ne sait que la forme, le reflet d'un reflet, l’onde de l'onde, le piège de la coïncidence entre le vu et le su, la “surface striée”, rectiligne, objective, contre la “surface lisse”, émergente, immanente.
Comment tendre alors vers le contemporain, où est-il dans la longue séquence du visible et de l’absence?
Peut-être à la manière du signal de ses étoiles qui se rapprochent dans leur passé insondable (obscène, etymologiquement ce qui offense la pudeur, par extension, ce qui offense notre sens du quantifiable, du mesurable), certaines sont si lointaines que le rendez-vous avec leur scintillement ne se fera qu’une fois l’étoile morte, “soleil noir”.
Il s’agirait alors pour le contemporain de “percevoir dans l’obscurité du présent cette lumière qui cherche à nous rejoindre et ne le peut pas...”, d’être “ponctuel(s) “à un rendez-vous qu’on ne peut que manquer.”, il ne s’agit pas de temps chronologique: “il est, dans le temps chronologique quelque chose qui le travaille de l’intérieur et le transforme. Et cette urgence c’est l’inactualité, l’anachronisme qui permet de saisir notre temps sous la forme d’un “trop tôt” qui est aussi un “trop tard”, d’un “déjà” qui est aussi un “pas encore”. Et de reconnaître en même temps dans les ténèbres du présent la lumière qui, sans jamais pouvoir nous rejoindre, est pérpetuellement en voyage vers nous.” (3)
L’eternité dans le temps, l’invisible dans le visible, d’oxymores hermétiques (réelle présence, parole contre écrit, etc...) se déplacent vers une suture, une disponibilité désenchantée, une hospitalité pour la trajectoire du “toujours-déjà-là”, sans triomphe et sans tragédie.
En proposant: generic - autoportrait, “camera obscura” (*), c’est de l’espace, du temps et de l’intonation de ce déplacement dont il s’agit, d’un e.space qui s’espace lui-même de sa représentation.
Ce sont des opérateurs humains qui le laissent apparaître (aletheia - dévoilement), contre l’oubli, la sidération dans le reflet, l’espace contraint dans le volume. Ils tentent de “l’habiter en poètes”.
La forme temporelle de ce travail (sa durée) qui coïncide avec une date, est le code cumulatif, la transcription de cette intention, la reconnaissance que nous sommes à l’intérieur d’une chronologie, sans pour autant tout y céder (not all).
Le son lui, est aussi un état des lieux, le constat d’un bruissement permanent qui nous traverse, nous impacte à la manière des photons, des particules, des événements de la matière, ils seraient les signes déclencheurs d’un alphabet autonome, non encore projeté où la rigueur graphique, quasi-mathématique y cotoie les arythmies biologiques, celles de notre chair symbolique.
L’e.space generic, articulé entre “camera lucida” et “camera obscura” tente de faciliter et de suggérer les conditions de possibilités de l’accueil de cette “lumière du présent”.
Ses parois sont des ouvertures, son plan deux fois rectangulaire est l’étant donné des régimes de l’image que l’e.space generic tente d’appréhender, de montrer, de proposer.
Avec cette installation il s’agissait aussi de comprendre cet espace en sa “camera obscura”, ayant vocation à devenir un nom propre, e.space generic.
Soyez bienvenus.
(1) Gérard Wajcman, L'image et la vérité, accédé depuis CAIRN. INFO: http://www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=SC_003_0057
(2) Henri Bergson, cité par Alain Beltzung, in Traité du regard, p.33, Editions du Relié, 2008
(3) Giorgio Agamben, in Qu’est-ce que le contemporain ?, p.24-26, Rivages poche / Petite Bibliothèque, Paris, juillet 2008`
sds @ generic, English language translation in progress, available on request.
(*)
generic - autoportrait, “camera obscura” 09:09:09
(9 minutes, 9 secondes, 9 centièmes)
installation audiovisuelle in situ
création le 09.09.09 @ l’e.space generic
&
generic - autoportrait, “camera obscura”
version vidéo 03:03:03
(3 minutes, 3 secondes, 3 centièmes)
disponible en DVD pour les adhérents
par generic associés: akg, jpa, sds + rdw
& aussi / & also: