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24/04/2010

generic, publications: “La pensée stupéfaite” de / by Guillaume Pigeard de Gurbert

«devant la découverte d’une empreinte laissée sur le sable par un autre que lui»

image RGB "standby b)" © jepial courtesy e.space generic

“Pour Guillaume Pigeard de Gurbert, la philosophie naît de ce qui n’est pas elle et la fait trembler.


On ne réalise jamais aussi bien la difficulté d’un tour piqué ou d’une croix de fer que lorsque le danseur ou le gymnaste rate sa figure, tombe, tremble. Peut-être parce qu’on aperçoit alors, d’un coup, la myriade d’éléments qui s’opposent aux voltiges, le poids du corps, les lois de l’équilibre, la tension musculaire, l’émotion, mais à l’encontre desquels le ballet ou l’exercice jouent leur possibilité même. Aussi un traité qui s’intitulerait Contre la danse ne serait pas forcément un pamphlet qui dénigrerait cet art, mais, au contraire, une réflexion sur tout ce qui «affecte» la danse et ce contre quoi elle doit aller pour être danse. C’est un peu en ce sens qu’il faut entendre le titre, trompeur de prime abord, que Guillaume Pigeard de Gurbert donne à son essai : Contre la philosophie n’est vraiment pas une critique de la philosophie mais un authentique exercice philosophique, profond et original, développant l’idée que la philosophie n’existe que par la rencontre de ce qui l’empêche.


Mistral. «Ramifier l’être de la pensée jusque dans la nervure inerte de ce qui ne pense pas», écrivait Michel Foucault dans les Mots et les Choses. Pour centrer l’idée qui porte Contre la philosophie, il faudrait inverser la phrase : faire que la nervure inerte de ce qui ne pense pas puisse en se ravivant stupéfier l’être de la pensée afin que de cette «interdiction» naisse la possibilité de la philosophie. En effet, «la pensée philosophique fonctionne à l’impensable qui la saisit et la laisse désemparée». Le philosophe que décrit Guillaume Pigeard de Gurbert, qui enseigne la philosophie depuis vingt ans et vit à la Martinique, est en ce sens comparable à un Van Gogh qui, essayant de capter la Provence dans sa peinture, y voit le mistral «entrer par effraction», au point que «la toile tremble toujours». De même que Van Gogh s’entête à s’installer sur un sol qui ne le porte pas mais le renverse - «J’ai beaucoup de mal en peignant à cause du vent, mais j’attache mon chevalet à des piquets plantés dans le terrain, et travaille quand même, c’est trop beau» - de même le philosophe œuvre malgré tout «au beau milieu de ce qui le souffle ou le glace, et qui fait que ses concepts ne sont jamais arrêtés, mais tremblent toujours». De quoi tremblent-ils ? Eh bien, de quelque chose qui n’est justement pas de l’ordre des concepts, mais d’un «autrement que le concept» qui est l’«objet» de la philosophie. «La dimension philosophique d’un "objet" se signale précisément par son indocilité au concept», si bien que la philosophie n’acquiert sa véritable dimension que lorsqu’elle brave ce qui n’est pas elle, c’est-à-dire «la résistance que ce qui est à penser oppose au concept», et donc s’expose au risque de «perdre», de chuter, et de ne pas pouvoir accéder à sa propre possibilité.


Contre la philosophie est une sorte de merle blanc dans la production d’aujourd’hui. En général, les philosophes s’installent d’emblée dans la philosophie comme si elle était déjà constituée, comme si elle était - en ôtant le sens courant - une «mathématique», une «action de la pensée» (mathésis) qui travaille déjà avec les concepts, alors que Pigeard de Gurbert va à rebours, jusqu’au moment originel où «elle est menacée de ne jamais pouvoir exister» parce qu’elle affronte ce qui se donne à elle avant que cela soit changé en objet de pensée. La mathématique s’occupe de la pensée «en tant qu’agent», alors que la philosophie n’est pas une agence de concepts, mais «la patience de l’autrement que le concept». C’est pourquoi on doit à son propos parler de «pathématique», les pathémata étant les données qui arrivent à la pensée avant qu’elle en ait élaboré la reprise mathématique. C’est ce principe pathématique de la philosophie qu’explore l’ouvrage de Guillaume Pigeard de Gurbert - dans lequel on entendra l’écho de Qu’est-ce que la philosophie ? de Deleuze et Guattari.


Dialogue. Ce principe sert d’abord à distinguer la science de la philosophie. La première se déploie tout entière à l’intérieur de l’élément conceptuel, et est un dialogue entre concepts établis et nouveaux concepts à établir. En ce sens, «l’obstacle qui anime la science, c’est le préscientifique». En revanche, «le mur qui arrête la philosophie, c’est l’aphilosophie», dans la mesure où elle fait face aux patiments, aux tremblements de l’en-dehors de la pensée, à ce qu’elle n’a pas elle-même produit, qui lui fait violence et qu’elle ne sait pas traiter (pour ce que vit un individu, l’exemple pourrait être la stupeur). Ce principe permet aussi de reparcourir l’«histoire pseudo-politique de la philosophie», et de lire les textes des philosophes - ici Platon, Descartes et Hegel - en repérant non ce qu’il y a entre les lignes mais les béances et les lézardes sur lesquelles ils reposent, qui les minent et en même temps leur confèrent une réalité philosophique. Le résultat est surprenant. Guillaume Pigeard de Gurbert cite à plusieurs reprises l’œuvre littéraire de Patrick Chamoiseau. Mais il évoque Daniel Defoe quand il veut d’un mot faire comprendre que lire les œuvres philosophiques, c’est identifier l’«épisode pathématique» qui «leur appartient en propre et qui se propage dans les interstices de la trame conceptuelle qu’elles tentent malgré tout de construire autour» : à savoir la sidération de Robinson «devant la découverte d’une empreinte laissée sur le sable par un autre que lui».”


(nos emphases)


par Robert Maggiori @ Le cahier Livres de Libé - Libération


Guillaume Pigeard de Gurbert, Contre la philosophie, Actes Sud, 304 pp., 23 €.


via Chikuwa4649, correspondant generic @ twitter


&



L'Homme nu & autres récits
envoyé par TEZIB. - Films courts et animations.


"Deux parcours dans le monde des philosophes


Textes extraits de : Si la philosophie m’était contée

de Guillaume Pigeard de Gurbert

Parcours I : Platon, Aristote, Kant,

Nietzsche, Roger-Pol Droit

Parcours II : Platon, Descartes,

Hobbes, Ricœur, Roger-Pol Droit

Mise en scène : Jean-Christophe Barbaud

Coproduction : Compagnie Labo T,

Odyssée Théâtre et Maison des métallos

Interprétation : Jérôme Bru


Création à Orange en janvier 2006

(Théâtre du Sablier)


Résumé

Un acteur, une valise à la main pour tout bagage, refait le voyage de la philosophie occidentale en quelques fulgurances de la pensée, à grandes enjambées, pour en raconter une histoire initiatique, métaphorique, loin d’un théâtre à thèse, en quelques points de vues ou repères fondamentaux et l’ouvrir à la curiosité, aux débats. Une traversée parallèle de l’histoire du théâtre confrontant chaque philosophe avec "un double théâtral" à travers les personnages du théâtre de son temps.

"Un voyage initiatique dans le temps, dans la pensée aussi, de Platon à Ricœur, au travers d’un spectacle modulaire. Ici pas de cours de philo, place à l’imagination dans l’imbrication des textes, leur mise en espace, leur théâtralisation. Ainsi enrobés, les mots prennent vie, forme aussi"


F.P. (Le Vaucluse Matin, 15 janvier 2006)"


credit TEZIB @ dailymotion

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