néanmoins, pour ne pas en rester là et “ne pas se moquer, ne pas déplorer, ne pas détester mais comprendre” (attribué a Baruch Spinoza), plus loin dans ce post, quelques pistes pour entrevoir autre chose, résolument vers la “chose” de l’art, peut-être même du cinéma, tout court.
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ainsi le monde (nous) rétrécit, ainsi ses (nos) ressources sont comptées, (contrairement a l’actualité, l’histoire des idées dure longtemps, heureusement, voir Malthus 1766 - 1834) ainsi aussi, notre époque se fait peur... tout doucement.
avec un cinéma biopolitique au sens le plus étroit, victimaire et pénitent (et surtout pas au sens de biopouvoir selon Michel Foucault), ici le bio est envisagé comme moraline de marché éthiquement gratifiant, après le “king size”, le “deluxe”, le "light", etc.
(à quand les Humvees avec pots catalytiques dans un docu-biopic-fiction de guerre juste?, à ce titre voir District 9 avec une attention particulière à la logistique militaire néo-onusienne deployée)
voici le technicolorement équitable, (le cinéma avec des "réserves" voir Bartleby, celui qui préférerait ne pas) de fait aussi étique qu’amnésique, et où, cela va de soi, le point de vue de Sirius, paradoxalement, rapproche (scruter n'est ni "voir" ni "être vu") et éloigne (examiner non plus) du face-à-face-avec-la-(petite)-mort-imminente (de la planète, des “6 milliards d’autres”) que pourtant l’on nous annonce, “révèle”, prophétise, tout doucement (plutôt Magicien d'Oz, que Dr Mabuse), avec voix-off, effets spéciaux, climat sonore ad-hoc, etc.
oxymore pré-rimbaldien de la panique régressive, vue du ciel ou du Titanic, tout est possible (everything goes): hélicoptère, avion, paquebot, cargo:
“Je sais moi des sorciers qui invoquent les jets
Dans la jungle de Nouvelle-Guinée”,
Serge Gainsbourg, Cargo Culte, in Melody Nelson, 1971
voir ici le culte du cargo: “Ne sommes-nous pas parfois conduits à appliquer des méthodes par mimétisme, sans réelle réflexion sur le bien-fondé de nos démarches, en pratiquant une sorte de pensée magique.../... ?."
en devoir d’illustration, ci-après quelques manifestations très récentes du culte du cargo au cinéma / événementiel biopolitique:
Le Syndrome du Titanic, Nicolas Hulot et Jean-Albert Lièvre
texte de la vidéo, sur le site de publication:
“Synopsis :
"Je n'étais pas écologiste quand j'ai commencé, il y a 30 ans, à voyager de par le monde. J'ai vu la planète se rétrécir sous mes yeux, je suis passé de la conviction insouciante de vivre dans un monde infini et immuable à la conscience d'un monde fini et vulnérable. Depuis presque 20 ans, je me bats avec d'autres pour alerter mais surtout mobiliser face à la menace. Aujourd'hui, le cinéma m'apparaît comme le moyen essentiel pour que chacun puisse à son tour, en France et à l'étranger, s'approprier le constat et partager mes sentiments. Que chacun puisse voir la Terre et l'Humanité telles qu'elles sont et telles que je les ai vues. Que l'Homme retrouve sa propre échelle dans le temps et l'espace. Ce film est un cri d'alarme, ne laissons pas le temps nous dicter le changement, mais aussi un cri d'espoir, saisissons l'occasion pour nous retrouver, mobilisons le génie humain en donnant enfin du sens au progrès." Nicolas Hulot”
“À vrai dire je n'ai pas toujours vu le monde tel qu'il est mais plutôt tel que j'avais envie qu'il soit. Trente ans de voyages et d'engagements progressifs forcent le regard et dévoilent une réalité éloignée de mes illusions. J'ai vu la planète se rétrécir sous mes yeux.
Le temps est venu de faire une pause, de s'extraire de la quotidienneté et de l'urgence chronique, de nous regarder tel que nous sommes.
De changer notre regard sur le monde. Que chacun se convainque lui-même que la mutation radicale est inévitable et souhaitable, et que dès lors elle peut se mettre en marche. C'est tout l'enjeu du "Syndrome du Titanic""
& encore:
bout de texte de la vidéo, sur le site de publication:
“Nous vivons une période cruciale. Les scientifiques nous disent que nous avons 10 ans pour changer nos modes de vie, éviter d'épuiser les ressources naturelles et empêcher une...”
&
a 23.20, Paris, France, le 16.10.09
...
cinéma alors, si toutefois “Le cinéma politique n’existe pas et (qu’) il n’y a qu’une façon politique de faire du cinéma"
& un autre éclairage:
“13. L’art se fait aujourd’hui à partir seulement de ce qui, pour l’Empire, n’existe pas. L’art construit abstraitement la visibilité de cette inexistence. C’est ce qui commande, dans tous les arts, le principe formel : la capacité à rendre pour tous visible ce qui, pour l’Empire, et donc aussi pour tous, mais d’un autre point de vue, n’existe pas.
14. Convaincu de contrôler l’étendue entière du visible et de l’audible par les lois commerciales de la circulation et les lois démocratiques de la communication, l’Empire ne censure plus rien. S’abandonner à cette autorisation de jouir est ruine de tout art, comme de toute pensée. Nous devons être, impitoyablement, nos propres censeurs.
15. Mieux vaut ne rien faire que de travailler formellement à la visibilité de ce qui, pour l’Empire, existe.
(nos emphases)
Alain Badiou, in Thèses sur l’art contemporain, source
enfin (temporairement) il reste que: “...si le cinéma n’est plus le média de l’image dominant, il est toujours le seul dispositif capable de projeter le spectacle de représentations profondément politiques, de visions d’organisations identitaires et sociales dont l’intérêt et la pertinence se sont affirmés tout au long du vingtième siècle.”
même si “... aujourd’hui, le cinéma est débordé de toutes parts. En tant que technique de diffusion, il est dépassé par la télévision ; en tant que structure originale de mise en forme des récits, il est concurrencé par le jeu vidéo ; mais, surtout, il est remis en cause dans sa dimension ontologique le liant au réel par la création d’images entièrement virtuelles. Toutefois, il dispose encore d’une force politique singulière.../...au titre de pourvoyeur de représentations du monde.
Relevant d’une logique de flux continu, la télévision est plus intéressante en tant que dispositif que par la particularité des images qu’elle fournit. Elle ne possède en effet pas la capacité propre de déployer une image du monde originale, susceptible de renouveler le commentaire sur la société. Le secret de sa puissance recèle dans sa capacité à s’inscrire dans la durée et dans la sphère privée, ce qui lui permet de développer une intimité entre le spectacle et le spectateur, mais lui ôte la dimension politique d’une projection publique. En outre, analyser une œuvre télévisuelle revient à s’arrêter sur la mise en scène, le montage et le scénario, trois points éminemment cinématographiques. ..."
(nos emphases)
Franck Bousquet, Rédacteur en chef, extrait “remonté”, in Présentation Site Cinéma & Politique, février 2005, http://www.politique-cinema.net/avantpropos.html
quelques pistes pour entrevoir autre chose, donc:
pour ce qui concerne “les autres”,
Krzysztof Kieslowski, Gadajace glowy [Talking heads], 1980
prob. tech. partie 3, en cours
&
Antoine Schmitt, The Full Cast (2009) , Le Grand Générique
(de tous les êtres humains)
"Un long générique défile lentement sur l'écran de cinéma, de bas en haut. Prénom, nom. Prénom, nom... C'est la liste des noms de tous les êtres humains. Tout le monde est nommé, et tous les noms sont affichés avec la même importance visuelle. La liste n'est ni chronologique ni alphabétique. La police de caractères, la taille d'affichage et la vitesse de défilement permettent la lecture de chaque nom.
Le Grand Générique est une oeuvre d'art conçue pour être exposée sur écran de cinéma, sur écran TV, videoprojetée sur le mur ou affichée sur écran d'ordinateur, selon le contexte d'exposition. La scénographie renvoie toujours à l'univers du cinéma. Lors de ses expositions, le Grand Générique affiche en priorité les noms des personnes liées à la zone géographique et au contexte artistique de l'exposition. Il crée ainsi un lien miroir avec les spectateurs. Les noms sont affichés dans l'alphabet local et mis en forme selon les us de l'endroit et de l'époque.
Il est important que tout le monde soit nommé. Cette oeuvre technologique pérenne installée sur internet utilise tous les moyens disponibles pour effectivement lister les noms de tous les êtres humains. Par exemple, chaque exposition du Grand Générique est l'occasion de collecter la liste des noms des personnes liées à l'exposition. C'est à travers ces additions successives, ainsi que diverses autres collaborations individuelles ou administratives sur internet, que la base de données se construit au fur et à mesure. La logique de l'ordre d'affichage reflète ce processus de construction. Il a pour but de n'oublier personne et de se maintenir toujours à jour en incluant les nouvelles naissances. Seuls les noms sont affichés, aucune autre information directe relative à la personne n'est collectée, stockée ou listée.
Extrapolant les 15 minutes de célébrité warholiennes dans notre société démocratique du spectacle, Le Grand Générique donne à chacun effectivement sa place au générique. Mais quel est le film ? Y a-t-il un scénario ? Qui l'a écrit ? Les choses sont-elles pré-programmées, ou bien chacun est-il encore libre de ses actes ? Le Grand Générique est ancrée dans mon obsession plastique de l'opposition entre destin et libre-arbitre, et renvoie in fine chacun à la question de son identité et de sa responsabilité. Est-ce un générique de fin ou un générique de début ?"
Antoine Schmitt
27jul09
Dossier de Presse:
http://www.thefullcast.info/TheFullCast_fr.pdf
A propos d'Antoine Schmitt : www.gratin.org/as
Réalisateurs figurant déjà au générique:
Emmanuel Finkiel, Atom Egoyan, Jean-Luc Godard, Luc Moullet, Marcel Trillat, Darren Aronofsky, Catherine Breillat, Arnaud Desplechin, Agnès Varda, Léox Carax, Jean-Louis Comolli, Pierre Carles, Jean-Jacques Annaud...
Ecrivains & critiques figurant déjà au générique:
Nicolas Saada, Noël Burch, Georges Didi-Huberman, Jean-Michel Frodon, Carole Desbarats, Alexandre Tylski, Jonathan Rosenbaum, Jean-Luc Nancy, Alain Bergala, Alain Masson...
http://www.generique-cinema.net/histoire/fullcast.html
&
& aussi, un peu moins,
http://interviewproject.davidlynch.com/www/#/about
pour ce qui concerne “la planète”:
Werner Herzog, The Wild Blue Yonder , 2005
"Synopsis
Le point de départ du film est un postulat hypothétique : un groupe de cosmonautes tournent autour de la Terre sans pouvoir y revenir puisque notre planète est devenue inhabitable. Les raisons demeurent " libres " : une guerre qui a tout détruit, une nouvelle maladie ravageuse, une irradiation fatale due à la disparition totale de la couche d'ozone, ou peu importe. L'équipage du vaisseau spatial doit donc trouver un endroit plus hospitalier quelque part dans notre système solaire et larguent la sonde inter-planétaire Galileo. Mais il semblerait que Galileo - après avoir renvoyé des données très inquiétantes - ait été envoyée en mission suicide…
Sans le savoir, nous avons depuis des décennies des visiteurs qui viennent de l’espace, d’une planète immergée dans l’eau : the Wild Blue Yonder. Leurs tentatives de créer une nouvelle communauté sur Terre ont, jusqu’à présent, échoué. L’un de ces étranges visiteurs -Brad Dourif - nous raconte cette incroyable aventure. Utilisant des mots et des images lyriques, il nous explique comment leurs tentatives de créer une nouvelle communauté dans l’espace sont vouées à l’échec. Il explique aussi comment, dans le passé, lorsque la Terre fut menacée d’extinction, une sonde spatiale habitée fut envoyée dans l’espace pour chercher un nouvel endroit où habiter. En vain. Depuis ce postulat et à travers l’histoire de la sonde Galileo, le film - une fable de science fiction - de Werner Herzog se conçoit comme une métaphore de l’espace. Construit comme un opéra visuel, The Wild Blue Yonder est un festin d’images exceptionnelles, de couleurs rares et de sons inouïs. A l’instar des mots qu’il occultera, les notes de violoncelle et les voix harmoniques se répondent en un dialogue qui emporte le spectateur dans l’espace infini . Un délice sonore mêlant la pureté des voix et la mélancolie du violoncelle, universel. Le message aussi, dans cette fable, qu’il nous faut protéger ce bien si précieux que nous possédons : notre planète.
Statement by Werner Herzog
'Des astronautes perdus dans l’espace, le secret de Roswell revisité, un extraterrestre – Brad
Dourif – qui nous dit tout de sa planète natale – the wild blue yonder – où l’atmosphère se compose d’hélium liquide et où le ciel est givré… tout ceci fait partie de ma fable de science fiction."
&
Koyaanisqatsi est un film réalisé par Godfrey Reggio en 1983, musique de Philip Glass, images de Ron Fricke, produit par Francis Ford Coppola.
conclusion temporaire,
... Le cinéma est un art impur. Il est bien le plus-un des arts, parasitaire et consistant. Mais sa force d’art contemporain est justement de faire idée. Le temps d’une passe, de l’impureté de toute idée.”
Alain Badiou, extraits de L’Art du Cinema n.4, (mars 1994). Texte de la conférence prononcée au Studio des Ursulines le 29 nov. 1993
accédé ici
voir obliquement aussi (en Anglais): Martian Museum: The strange art of planet earth